Le Vipassana
Il y a 2500 ans, Siddhattha Gotama, le Bouddha, enseigna un chemin d’intériorisation simple et direct qui permet à la conscience humaine la libération du cœur et de l’esprit.
La méditation Vipassana est une des plus anciennes techniques de méditation. Vipassana veut dire «voir les choses telles qu’elles sont». Par l’observation de l’expérience, ici et maintenant, dans notre corps, dans notre cœur et dans notre esprit, nous développons une capacité de présence à l’instant dans toutes les situations de notre vie. Cette présence purifie les schémas habituels de souffrance. C’est une science de l’esprit, qui nous permet de voir comment le fonctionnement du corps, des sentiments, des perceptions, des pensées et de la conscience peut mener à créer de la souffrance ou à se libérer de la souffrance. Par la constance de cet exercice, notre expérience limitée et égocentrée de nous-même et du monde se transforme peu à peu en une expérience universelle, pleine de compassion et de paix.
Ce chemin intérieur repose sur 3 aspects que nous présentons ci-après:
Une dimension éthique :
Développer une attitude respectueuse et bienveillante par nos pensées, nos paroles et nos actes.
Une dimension d’exercice :
Se donner les moyens, grâce à l’exercice de la méditation, de développer en nous la pleine conscience de l’expérience dans l’instant.
L’esprit, ainsi libéré du passé et du futur, peut accueillir la vie telle qu’elle est avec joie et disponibilité.
Une dimension de sagesse :
Développer une ferme intention pour se libérer de l’avidité, de l’aversion et de l’aveuglement et pour vivre avec sagesse et compassion.
Une dimension éthique :
les 5 préceptes
1. Respecter et préserver la vie sous toutes ses formes, ne pas tuer.
Le 1er précepte nous propose de consciemment nous engager à protéger la vie, par nos pensées, nos paroles et nos actes. Nous pouvons nous encourager à cultiver ce précepte, par exemple en sortant une araignée qui se balade chez nous, plutôt que de la tuer, en triant nos déchets pour préserver la Terre, en nous engageant à soutenir des associations qui défendent des valeurs éthiques.
2. Respecter la propriété d’autrui, ne pas voler.
Le 2ème précepte nous propose de consciemment nous engager à cultiver la générosité, par nos pensées, nos paroles et nos actes. C’est bon de ne pas succomber à la convoitise, de cultiver la simplicité dans notre manière de vivre, et de se sentir solidaire de ceux qui souffrent de l’oppression, de l’injustice sociale. Par ce précepte, nous pouvons nous engager dans le partage plutôt que dans le « chacun pour soi ».
3. Respecter autrui en étant clair dans nos paroles, ne pas mentir.
Le 3ème précepte nous propose d’offrir la joie autour de nous par nos paroles et notre silence. C’est important de nous souvenir de la force des mots qui peuvent réunir dans une communion universelle et qui peuvent séparer dans une souffrance abyssale. Cultiver une parole porteuse de sincérité, de bonté, et de bienveillance, voilà ce qui est bénéfique pour nous-même et pour chacun.
4. Respecter nos corps par une conduite sexuelle responsable.
Le 4ème précepte nous propose de protéger notre intégrité et celle des autres en nous engageant dans une sexualité qui ne soit pas cause de souffrance. Dans un monde où le corps est présenté comme source de plaisir immédiat, c’est essentiel de cultiver une réflexion sur la valeur d’une sexualité liée à un engagement d’amour et au respect du bonheur d’autrui.
5. Respecter la santé du corps, ne pas prendre de substances toxiques.
Le 5ème précepte nous propose de maintenir notre corps présent et clair en lui offrant une nourriture saine. Tout abus, non seulement de drogues ou d’alcool, mais aussi de télévision, de magazines, de bavardages ou de loisirs nous éloigne d’une attitude éveillée et sage. L’esprit s’endort et devient confus. Nous sommes incités à nous souvenir du cadeau que nous faisons non seulement à nous-même, mais aux autres, en offrant à notre corps de pouvoir fonctionner avec tout son potentiel.
Ces 5 préceptes sont l’ancre sur laquelle l’exercice de la méditation repose. Nous pouvons constater comment nos paroles et nos actes non respectueux sont lourds à porter. Le souvenir revient nous harceler et nous ne pouvons pas être en repos.
Avoir une conduite respectueuse à l’égard d’autrui, à l’égard du monde et de nous-même, est une condition essentielle à l’approfondissement de l’exercice de la méditation, et à l’éveil de la sagesse et de la compassion.
Une dimension d’exercice :
la pleine conscience à l’instant
« N’ayez aucun doute
quant à la puissance purificatrice
de laisser être l’instant.« Le Bouddha
La pratique de la méditation est directement liée au développement de la conscience. Nous vivons dans un monde où nous sommes stimulés à travailler le corps, les émotions et la pensée. Nous avons oublié ce qui est essentiel pour vivre en paix : la pleine conscience. Nous ne savons plus être présent, simplement aux choses telles qu’elles sont dans l’instant.
Le Bouddha a offert un enseignement précis pour apprendre à la conscience à rester dans le présent, sans se laisser perpétuellement happer dans le passé et le futur.
Pour pouvoir le faire, nous développons une attitude de non attachement et de curiosité face à l’expérience. Au lieu de nous identifier à ce que nous vivons et de manipuler sans cesse l’expérience de manière à ce qu’elle soit à notre goût, nous mettons la présence à l’instant en priorité. Notre corps et notre esprit deviennent un endroit précieux, étonnant, étrange parfois, qui peut être observé par la conscience. Nous entrons ainsi dans la contemplation de qui nous sommes plutôt que dans l’identification.
Le Bouddha a parlé de 4 aspects de l’être qui sont à contempler dans l’exercice de la méditation :
Être présent dans notre corps. C’est se laisser ressentir les sensations, écouter les sons, voir les formes et les couleurs, savourer les goûts, sentir les odeurs, et également ressentir l’impact des émotions et des pensées dans les réactions corporelles. C’est apprendre à garder la conscience sur ce qui est vécu et à pleinement goûter l’expérience dans le corps.
Etre présent dans notre cœur. C’est voir combien nous sommes des êtres sensibles, agités sans cesse par les impacts des expériences vécues. Lorsque nous sommes en silence et que nous regardons à l’intérieur, nous constatons combien le cœur est touché par ce qu’il aime, ce qu’il n’aime pas, et ce qui lui est indifférent. La conscience a la capacité de ressentir et de nommer ces expériences en terme d’agréable, désagréable et neutre, simplement, ce qui permet une libération de l’identification à ces expériences.
Etre présent dans notre esprit. C’est cultiver la pleine conscience de manière à contempler le fonctionnement de l’esprit dans sa totalité. L’attitude de non attachement et de curiosité permet de simplement constater la nature des expériences qui arrivent et passent : le doute est juste le doute, l’anxiété est juste l’anxiété, le jugement est juste le jugement, la joie est juste la joie. Par ce travail répétitif de contemplation, l’esprit apprend une nouvelle manière de se lier à l’expérience : il peut contempler le plaisir et la peine et rester en paix.
Etre présent aux dharmas, c’est à dire à tout ce qui est. C’est savoir employer les outils de présence et de compréhension pour être libre dans l’instant. Tout est notre maître, car l’esprit sait que les conditions ne sont pas responsables de notre bonheur ou de notre malheur. Il s’ensuit une libération de l’identification à l’expérience. Comprendre que ces expériences ne sont pas « moi », c’est voir le « moi ». La confiance devient inébranlable : l’esprit laisse le Dharma, la Vérité, faire son œuvre librement à l’intérieur de l’être.
Une dimension de sagesse :
les 4 vérités nobles
Première vérité :
La souffrance, l’insatisfaction est une réalité de la condition humaine. Nous sommes limités et vulnérables. Nous essayons depuis la nuit des temps de lutter contre la souffrance physique et psychique, sans trouver une réelle libération. L’expérience est parfois souffrance. Contempler cette vérité dans l’exercice de la méditation permet de sortir du déni inconscient qui nous pousse à être en conflit avec le réel.
Deuxième vérité :
La cause de la souffrance est l’attachement. Nous sommes, souvent inconsciemment, attachés à l’image que nous avons de nous-même, des autres et du monde. Cet attachement nous oblige à concevoir les choses d’une manière limitée dans le temps et dans l’espace. Lorsqu’il y a attachement, il y a aveuglement. La conscience se ferme sur nos opinions, nos peurs et nos réactions. Et nous nous sentons séparés des autres et du monde.
Troisième vérité :
Si nous lâchons prise de l’attachement, nous sommes libérés. Que reste-t-il de « moi » lorsque j’ai lâché tous mes attachements ? La réponse à cette question n’est pas intellectuelle. Pour être porteuse de sagesse et de compassion, elle doit être vécue, vérifiée, constatée à l’intérieur de ce corps-esprit. Elle pointe aux deux dimensions de la nature humaine : sa nature conditionnée et sa nature essentielle ou ultime. Par nos attachements, nous sommes limités à notre personnalité, à l’endroit où nous vivons, à l’époque qui est la nôtre. Par notre nature ultime, nous sommes libres de tout attachement. Nous avons en nous le potentiel de réaliser que nous ne sommes rien, et, n’étant rien, nous sommes tout.
Quatrième vérité :
Le Bouddha a développé magistralement un chemin progressif qui nous permet de toucher à la troisième vérité, à la libération. C’est le chemin à huit voies :
1 La compréhension juste.
2 La pensée ou l’intention juste.
3 La parole juste.
4 L’acte juste.
5 Le mode de vie juste.
6 L’effort juste
7 La concentration juste.
8 La présence ou la pleine conscience juste.
Ce chemin représente les aspects à développer pour permettre à l’esprit une transformation radicale de son mode de fonctionnement. D’une attitude liée à la peur et au contrôle, nous passons à une attitude sage, toute accueillante, simple et bienfaisante pour nous-même et pour les autres.